KikouBlog de Le Lutin d'Ecouves - Avril 2018
Le Lutin d'Ecouves

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COURS TOUJOURS épisode 9

Par Le Lutin d'Ecouves - 30-04-2018 17:08:31 - 3 commentaires

 
Longue distance


Je ne suis pas fait pour la longue distance. Je m'en aperçois dès le trentième kilomètre de course mais comme je le répète à l’envi : en ce qui concerne la course à pied, je suis à voile et à vapeur... et au gaz aussi. J'entretiens bêtement l'illusion que je peux être polyvalent.

Ne résistant pas aux sollicitations de mes camarades, je me suis souvent engagé dans des aventures à la fin desquelles l'addition fut souvent salée. Mon ami Joël avait trouvé une expression décrivant bien mon état au terme de ces épreuves : "Tiens, j'ai encore vu le Lutin sur le bord du chemin avec le capot ouvert et le radiateur qui fume" ; il faut dire qu'en tant que modèle des années 50, je ne bénéficie pas d'un système de refroidissement performant.
 
Incapable de gérer mon effort efficacement, j'explosai dès les premières éditions du 61km d'Ecouves, course pourtant à la portée de beaucoup vu son dénivelé modeste. Je partais systématiquement trop vite, espérant vainement gagner quelques dizaines de minutes pour compenser l'inévitable naufrage qui devait de toute façon survenir, me laissant soit terminer physiquement en haillons soit abandonner piteusement sous les lazzis moqueurs de mes camarades plus robustes et plus opiniâtres.

Je me souviens d'un trail de Guerlédan lors duquel, premier de mon groupe de Trailers d'Ecouves durant 20km, je m'échouai (ou plutôt je méchoui) lamentablement sur les dures rives du 42ème km pour ne plus repartir. Je me souviens du trail de Vulcain alors en janvier où je fus transformé en bonhomme de neige à l'instar du Raid 28 qui me valut le surnom de Findus 71.

Pourtant, je persistai en enfilant divers longs trails entre 60 et 80 km et quand je dis en enfilant, je devrais utiliser la forme passive vu l'état dans lequel je me trouvais à l'arrivée. Une de mes pires expériences fut la Saintélyon, course de nuit de 10h23' lors de laquelle j'ai vraiment eu l'impression que j'allais y rester à force d'épuisement, de froid et de chutes répétées. Il faut dire que pour courir 68 km de nuit par moins 9 degrés sur une patinoire en pente raide, il ne faut pas être net...

J'ai même tâté du hamster... Non, je n'ai jamais torturé le moindre animal en l'entourant préalablement d'adhésif ; non, je parle de course longue sur circuit comme les 6 heures de Briouze et ses péripéties diarrhéiques ou le 24 heures de la No Finish Line 2016 que je finis tellement proche de l'état d'esquimau que je ressens parfois encore la désagréable sensation d'avoir un bâtonnet inséré dans le fondement. Devenu prudent, je rééditai l'expérience non en courant mais en marche nordique, ce qui me permit de terminer en bonne et due forme plutôt qu'en bonnet difforme (merci Coluche).

Avec l'âge, l'expérience et un peu de jugeotte, je finis par apprendre à gérer l'effort, ce qui me permit d'exploser beaucoup moins tout en me plantant quand même comme lors du TGV où ma prudente gestion me valut un arrêt à la barrière du 50ème km pour cause de gastéropodisme.

Un minimum de lucidité fit que jamais je ne songeai à m'inscrire sur les épreuves mythiques que fréquentaient déjà mes camarades : l'UTMB ou la Diagonale de Fous. Je resterai pour toujours un potable coureur de semi-marathon doublé d'un crossman hargneux. Au-delà, je suis un manant égaré parmi les stratosphériques ultra-trailers dont la hauteur de vue leur épargne le spectacle d'un lutin agonisant rampant dans la glèbe.

Bref, je ne suis pas fait pour cela. Quoique...

Quoique... il y eut cependant trois petits miracles : le 80 km en Off autour de Belle-Ile qui me fit tomber amoureux de cette merveille géologique et lors duquel je fis les 30 derniers kilomètres en ne me ravitaillant qu'à la bière ; l'Eco-Trail de Paris où je n'ai pas touché terre grâce à la présence de deux fées au physique de walkyries qui m'amenèrent miraculeusement à effectuer les 80 km en 9h41' ; et enfin la course mythique s'il en est : les 100km de Millau que je m'étais promis de courir l'année où je prendrai ma retraite. Malgré la chaleur et la distance, je pus ce jour-là gérer efficacement mon effort et, après 80km, je me surpris à un moment à pousser des cris de jubilation dans le noir en m'apercevant que je courais encore dans la côte au retour de Ste Affrique. Contrairement aux courtes distances, je n'avais pas couru avec mes tripes mais avec ma tête, organe pourtant mouvant dont je me méfie par-dessus tout.

En vue des riantes rives de la sénilité, je ne puis cependant pas m'empêcher de m'inscrire à des épreuves hors gabarit pour un lutin aux courts appendices ambulatoires. Un nouveau tour (off) de Belle-ïle m'attend dix ans après le premier et cet été, je vais tenter le diable dans les Alpes pour un trail de 65 km : Les Passerelles. Je sais que je vais naviguer à nouveau aux limites du naufrage mais comme dit Jacques Rouxel, créateur des Shadoks :

“En essayant continuellement on finit par réussir. Donc : plus ça rate, plus on a de chance que ça marche.”

 © Jacques Rouxel

 

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LE VERT D'HIER AU VERDIER

Par Le Lutin d'Ecouves - 25-04-2018 17:32:53 - Aucun commentaire

 

Il est encore là !

 

 Photo XC d'Ecouves

Encore un Lutin et encore une course en Ecouves ! Quand cela va-t-il enfin cesser ? Le récit ICI.

 

 

 

COURS TOUJOURS épisode 8

Par Le Lutin d'Ecouves - 15-04-2018 11:29:50 - 3 commentaires


Ma course


Chaque coureur a sa course préférée ; en ce qui me concerne, c'est Alençon-Médavy, seize kilomètres en ligne qui vous propulsent en haut de la forêt d'Ecouves après une ultime montée de cinq kilomètres en continu. 
 
Chez moi, c'est une institution qui, dans nos glorieuses années, a attiré jusqu'à 5000 coureurs et nombreux sont les Alençonnais à avoir gravi ce Golgotha local. Eh oui, cette épreuve en est une.

La première fois que j'ai participé à cette classique normande, j'étais plus que débutant, je pris le départ fort vite et, quand au pied du Vignage se profila la fameuse côte de Médavy, je ressentis pour la première fois ce que voulait dire l'expression "semelles de plomb". Ce qui me marqua le plus, ce ne fut pas le chrono fort acceptable d'1h17' mais plutôt la nuit qui suivit que je passai sur les toilettes, agité par les spasmes vengeurs de mes intestins qui ne partageaient pas ma nouvelle passion sportive. 

L'année d'après, je réitérai et explosai vers le douzième kilomètre, faisant cinq minutes de plus que l'année précédente. J'étais conquis : cette course était faite pour moi.

Alençon-Médavy pour moi, c'est l'échauffement au milieu de la fourmilière, ce sont les buissons pris d'assaut par les vessies surexcitées, c'est l'attente parmi la foule puis une bande de fous qui dévalent la rue de Bretagne à tombeau ouvert, c'est un quartier bourré de spectateurs d'où fusent les cris d'encouragements de mes anciens élèves ou de leurs parents, c'est ensuite une première côtelette qui fait rire les habitués, une plaine sur laquelle il faut aller vite mais sans se griller, une deuxième côte plus sérieuse au pied de laquelle le huitième kilomètre me donne presque à coup sûr mon chrono d'arrivée, c'est enfin un dernier plat fort court puis la montée dans la merveille forestière qui semble vous avaler, cinq kilomètres de côte avec l'interdiction de descendre sous les 10 à l'heure sous les encouragements des pique-niqueurs qui brandissent leurs bouteilles de pinard puis le dernier kilomètre moins pentu mais que les poumons estiment encore trop dur, une foule qui se resserre pour n'être plus qu'un couloir hurlant d'où j'émerge à bout de souffle, les cuisses en feu mais l'esprit en paix.

Maintenant, c'est la bousculade du ravitaillement, les sempiternels "t'as fait combien ?" et enfin la descente avec les amis en trottinant vers Alençon sous les yeux ébahis des derniers spectateurs qui se frappent la tempe droite avec l'index en nous voyant effectuer le retour à pied.

La montée vers Médavy est un théâtre de verdure sur lequel se jouent des comédies, des tragédies et parfois des drames. Je me souviendrai toujours de cette fournaise inattendue dans laquelle j'accompagnai Cathy qui paraissait au bord de la rupture et qui montait, montait, montait, le rouge au visage et la rage au ventre pendant que les hommes tombaient autour d'elle. Je me souviens de ce concurrent suffoquant sur le bord du quatorzième kilomètre auquel je donnai notre dernière réserve d'eau et des terribles crampes qui prirent ma camarade dès la ligne franchie. Je me souviens de ce tout jeune homme qui perdit la vie ce jour-là et dont les hêtres et les chênes semblent garder le souvenir longtemps après.

Durant des années, je n'ai fait que progresser pour finalement atteindre les 1h07' aux alentours de 50 ans. Alors que je suis un coureur moyen, terminant souvent dans le ventre mou du peloton, j'ai toujours eu d'excellents classements sur cette course, atteignant même la 380ème place sur plus de 3000. J'espère encore cette année ne pas dépasser les 1h20'* pour mes 62 ans, ce qui sera difficile, bien sûr, mais pas impossible car c'est "ma" course.
 
 
*Finalement 1h17 comme l'année dernière (534 sur 2142) pas de doute, c'est vraiment "ma course".
 
 
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