Trente et un degrés Celsius
J'avais le choix en ce dernier jour de juin, soit je restais tout l'après-midi dans ma classe transformée en sauna et je rendais vingt-trois loques liquéfiées à leurs parents le soir, soit j'organisais une évasion générale et j'emmenais mes élèves à la roseraie d'Alençon pour y bénéficier de l'ombre de ce vieux jardin public qui sent bon les siècles passés.
Allergique au farniente et à l'inactivité improductive, j'emmenai avec moi un ouvrage que j'avais depuis un moment l'intention de lire aux enfants de mon CE2 qui venaient de passer un trimestre de sciences à étudier et à construire des exposés sur la forêt et sa gestion avec la participation de l'ONF.
Nourrir les esprits tout en reposant les corps, cela convenait à cet après-midi de feu.
Assis sur un banc public, les enfants à mes pieds, j'ai durant presque une heure lu et commenté cette merveilleuse nouvelle de Jean Giono écrite dans un grand français classique aux mots justes, simples et grandioses à la fois.
L'histoire raconte l'histoire d'Elzéard Bouffier, un homme que le deuil a poussé à vivre en ermite dans une région désertique. Cet homme que rien ne retenait plus à la société a entrepris de semer une forêt sur cette terre aride du nord de la Provence.
De 1913 à 1947, Giono décrit comment le retour des arbres dans une région qui les avait oubliés va petit à petit transformer le pays, provoquant le retour de l'eau, des animaux et finalement des hommes.
Loin du discours naïf et larmoyant de certains textes écolos, la nouvelle de Giono expose magistralement la problématique du rôle et de la responsabilité de l'homme dans la gestion de la nature.
Mes élèves, formés depuis un moment au concept d'homme jardinier de la nature, écoutaient religieusement les mots secs et précis de Giono. Par moments, le flux s'arrêtait quelques secondes et nous n'entendions plus que le chant des oiseaux. La beauté de cette histoire a toujours eu le don de me toucher et je ne puis la lire sans que l'émotion ne ponctue çà et là le récit de quelques respirations sensibles.
Cette histoire écrite en 1953, Giono en a volontairement mis les droits dans le domaine public de manière à en faciliter la diffusion. Frédéric Back, un cinéaste canadien en a tiré un éblouissant film d'animation de 30 minutes (Philippe Noiret, récitant) dont sont tirées les illustrations de ce billet.
Pour terminer, je vous livre l'intégralité du film qui a été mis en ligne sur Dailymotion mais que cela ne vous empêche pas d'acheter l'album Gallimard pour le lire à vos enfants. Quant à l'oeuvre de Frédéric Back, je ne puis que vous recommander de l'acheter en coffret 4 DVD. Vous ne regretterez pas ce que vous y découvrirez...
Première partie :
4 commentaires
Commentaire de benoitb posté le 01-07-2009 à 15:08:26
Juste un mot : merci.
Commentaire de Mustang posté le 02-07-2009 à 00:23:58
Le film est éblouissant,
quant au fond, c'est du Giono! dans la veine de Regain! c'est un beau voyage onirique, une belle fiction, un eden auquel on aimerait croire, oui vraiment y croire, je vais en toucher deux mots à Borlo
Commentaire de Pegase posté le 02-07-2009 à 14:18:40
Tu m'ôtes les mots de la plume mon cher Philippe...
Commentaire de philtraverses posté le 03-07-2009 à 06:44:08
dommage que je n'ai pas eu un instit comme ça. Dans le lot des élèves il y en a bien eu deux ou trois, les respirations sensibles, qui ont du entrer en résonance avec cette histoire soit la proportion dans la population de gens ouverts et sensibles
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