KikouBlog de Le Lutin d'Ecouves - Juillet 2014
Le Lutin d'Ecouves

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Archives Juillet 2014

UN PETIT MONDE DE BEAUTÉ

Par Le Lutin d'Ecouves - 30-07-2014 14:36:59 - 6 commentaires

Cent petits mètres carrés de jardin en Normandie, un univers foisonnant où grouille une faune fantasque et féerique digne des romans de Jack Vance. Les Grands, oublieux de l’enfance et aveugles dans leur vision altière, passent à côté de la beauté évidemment élégante d'un monde où la vie vaut peu de choses, où la vie est tout. Regardons-le avec des yeux de lutin :
 
 
Cepaea nemoralis, l’escargot des haies que ma Josette tolère* en son jardin car il est peu vorace. Ce petit gastéropode est un joyau de diversité car aucun n'est identique à son voisin du fait des 32 combinaisons de couleur et de dessin existantes.

 
Je ne m'en lasse pas : l'énorme femelle Eumène unguiculé, aussi pacifique qu'impressionnante...

 
... et son petit mâle, plus noir et plus timide que j'aperçois pour la première année.

 
Si les abeilles communes sont fort nombreuses (aucun traitement dans mon jardin)...
 
 
... d'autres abeilles, solitaires celles-ci, fréquentent  le lieu comme cet halictus scabiosae.

 
Si les espèces de mouches sont nombreuses, la palme de la beauté revient à la mouche volucelle zonée.

 
La scolie hirsute, en voie de disparition en Europe, est un prédateur de la cétoine : la femelle de cet hyménoptère pond ses œufs dans la larve du coléoptère qui est dévorée vivante par la future scolie qui va ensuite se nymphoser dans un cocon qu'elle a tissé.
 
 
Verte sur vert, l'éphippigère pense que je ne l'ai pas vue mais me surveille quand même de son regard torve.
 
 
Vert sur verte, les chrysomèles de la menthe** passent leur temps à manger nos plants et à se reproduire.
 
 
Dans ce monde, le dernier mot revient aux araignées comme cette enoplognatha ovata...
 
 
... ou l'épeire diadème qui révise sa géométrie avant de prendre possession du jardin au début de l'automne.
 
 

* Pas de massacre, les escargots petits gris et les limaces sont ramassés à la main puis relâchés en campagne (plusieurs centaines cette saison !!!).
 
** Josette ne cultive de la menthe que pour admirer ces petits bijoux de chrysomèles.
 
 
 
 
 

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UN SAUVETAGE DRAMA-TIQUE

Par Le Lutin d'Ecouves - 25-07-2014 09:29:52 - 10 commentaires

Horreur !
 
 
Observant une cétoine dorée sur mon chardon bleu, je m'aperçois que ce bel insecte n'a pas l'air en forme.


Atroce, ce coléoptère est envahi par des tiques agglutinées en groupes et collées par des fils (la tique est le plus gros acarien, donc un arachnide). Je prélève l'animal et le mets dans une boîte pour observer les dégâts.
 

Les tiques, petits vampires à huit pattes, sont bien décidées à bouffer le gros insecte en passant par ses jointures. Un gros paquet s'est fixé au niveau du troudu, la partie la plus vulnérable. Ça doit gratter sévère, j'voudrais pas être à sa place. La cétoine est-elle condamnée ? C'est sans compter sur le Lutin et sa Josette qui aiment et protègent les bêtes (sauf les tiques et les moustiques, faut pas exagérer).

 
Aussi sec, le docteur Lutin enfile ses gants chirurgicaux et, aidé de son assistante, il débarrasse patiemment l'insecte de ses parasites à l'aide d'un pinceau doux et d'une bassine d'eau tiède.
 
 
L'opération prend bien 20 min car les tiques se défendent en revenant systématiquement vers leur victime dès qu'on les en éloigne grâce aux fils collants qui y sont fixés. Pas facile mais, après pas mal d’efforts, les vampires gisent noyés au fond de la bassine. Ils sont une centaine !
 
 
Le résultat est là, l'insecte-bijou est vierge de tout parasite mais il est en état de choc, partiellement asphyxié par l'eau qui a un temps bouché ses stigmates. Je le pose sur une feuille de rhubarbe pour qu'il sèche et récupère. Un quart d'heure après, il s'envole apparemment en pleine forme.
 
 
 

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LE JARDIN SE CRÉE

Par Le Lutin d'Ecouves - 21-07-2014 12:41:56 - 3 commentaires

En lisant le blog de mon ami François, ancien Sagien, je me suis dit que son article sur son jardin de parisien méritait une réponse normande, histoire de lui remémorer la douceur et la modeste splendeur de notre petit désert commun : l'Orne.
 
 
Un matin de juillet entre les dards d'un soleil indécis
 (Paroles d'André Balzer et Jacques Chabiron)
 
 
 
 
Un instant de brume 


Dans une ouverture du temps


Il s'élève, il s'élève


Dans un reflet de sang


Comme une parcelle de lumière


Comme l'orage éclaire le vent


Ivre d'extase, le voleur


Dérobe l'herbe de couleur


L'huile d'éther qui voile l'air


Et l'on quitte la Terre


Comme une parcelle de lumière

 
Comme l'orage éclaire le vent
 

Regarde, j'ai volé l'extase ! J'ai les yeux pleins de lumière.
 
 

Regarde, j'ai volé l'extase ! Ils reflètent un mystère.


 

******


Le Voleur d'Extase tiré de l'album "L'Araignée-Mal"
Atoll (1975)
 
 
Note : malgré les allusions évidentes de la chanson, je ne fume aucun produit de mon jardin...
 
 
 

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LES NAINS PORTENT QUOI ?

Par Le Lutin d'Ecouves - 17-07-2014 23:31:30 - 1 commentaire

 

 

Vous aurez la réponse en lisant CECI.

 

 

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NAGUÈRE, DES ÉCOLES - ÉPISODE 17

Par Le Lutin d'Ecouves - 07-07-2014 11:48:27 - 13 commentaires

Monsieur Roland

1966-67

J'étais un élève médiocre, comme on disait à l'époque. Arrivé à l'école de la Chiffogne au cours de l'année précédente, je m'étais retrouvé au milieu de garçons bien meilleurs que moi et il avait été convenu que j'allais redoubler ma 7ème que l'on n'appelait pas encore CM2.

Je n'étais pas fâché en cette rentrée 1966 de changer de maître, le précédent étant passablement effrayant. J'étais admis chez Monsieur Roland, dans l'autre 7ème.

Nous n'étions que 29 garçons, ce qui était un progrès par rapport aux 36 à 37 élèves de mes classes de cours élémentaire ; et puis, c'était la classe de Monsieur Roland.

Cheveux gris en brosse, sempiternelle blouse et larges lunettes, Monsieur Roland devait avoir cinquante ans. Il fumait constamment en débitant son cours, ce qui justifiait le fait qu'été comme hiver, la fenêtre à gauche de son bureau était ouverte. La fumée, obéissante comme ses élèves, n'arrivait jamais jusqu'à nous et se contentait de fuir docilement par cette issue. Couverts de nos chemises, pulls en laine et blouses en coton ou nylon, nous n'avions jamais froid. Il faut dire que les légendaires hivers Francs-Comtois endurcissaient quiconque y survivait.
 
La rigueur était le maître mot de l’enseignement de ce maître à qui l'on confiait parfois la formation d'autres maîtres ; la rigueur et la clarté. Je me mettais à comprendre ce qui m'échappait jusqu'ici par manque de précision ou par manque d'intérêt de ma part. Le monde était plus clair, plus lisible.
 
Chaque erreur, chaque manquement au règlement, chaque leçon non apprise donnait lieu à l'inscription sur le cahier de sanctions-récompenses tenu par le premier de la classe. Le barème était clairement établi et chaque punition pouvait être compensée par un bon résultat. C'est comme cela que mon aisance naturelle en orthographe servait de contre-feu à ma paresse en ce qui concernait les leçons.
 
Ce modus vivendi apparemment sévère était bien vécu par le groupe qui en acceptait les tenants et les aboutissants car tout cela se passait dans le calme ; Monsieur Roland ne se fâchait jamais.

L'année scolaire était un long fleuve tranquille qui déroulait sur trente heures hebdomadaires ses divisions à virgule, ses hectares, ses verbes au conditionnel passé deuxième forme, ses participes passés employés avec avoir et ses dictées-questions quotidiennes. Entraînés sur cinq jours pleins comme des sportifs de haut niveau, nous ne pouvions être que bons. Même moi, petit redoublant.
 
C'eût pu être ennuyeux comme une année de collège mais Monsieur Roland était passionnant. Il savait tout, du moins le croyions-nous ; il avait tout vécu et avec cet ancien maquisard communiste, la seconde guerre mondiale devenait une épopée vue de l'intérieur. Il avait aussi un goût prononcé pour les sciences et, avec lui, les pages du livre de leçons de choses sortaient à l'air libre. Je me souviendrai toujours de cette expérience de chimie lors de laquelle avec de l'acide et du cuivre, il fit apparaître, tel un magicien, une fumée violette dont le comportement quasi-vivant me fascina.

La culture physique avait une bien maigre place en fin d'année le samedi après-midi et la musique se pratiquait sous la direction du monsieur qui parlait dans l'imposante radio à lampes qui trônait sur l'armoire. De ces séances, je me souviens seulement de la fin d'année lors de laquelle nous apprîmes avec enthousiasme l'Hymne à l'Universelle Humanité de Marcel Bouchor sur l'air de l'Ode à la Joie de Beethoven. 

Cette année passée dans le calme, l'ordre, la clarté et la précision avait fait de moi un bon élève et, lors de la "composition" du mois de juin qui reprenait les épreuves passées par la classe de certif, j'eus la surprise de terminer en tête, devant le jusqu'ici indéboulonnable premier qui piqua du nez pour l'occasion.

Mon père, dont les sentiments restaient sanglés dans son uniforme d'officier de cavalerie, exprima son contentement en me disant : "C'est bien". Et il m'offrit un cahier, une gomme, quelques crayons et une énorme pièce de cinq francs. Il était fier de moi.


Dès la rentrée de sixième, incapable de comprendre le monde dans lequel j'évoluais, j'entamai une lente descente qui devait m'amener à un second redoublement en quatrième. Monsieur Roland était déjà loin. Je ne le revis plus.


Et pourtant, toutes ces règles d'orthographe, problèmes de trains, anecdotes historiques ou schémas du corps humain résonnaient en moi, raisonnaient en moi. Et dans les moments les plus sombres de mon parcours scolaire chaotique, Monsieur Roland était toujours là, avec sa rigueur, son calme et sa clarté. Comme une bouée que l'on lance à celui qui se noie...




******

4 juillet 2014

La porte de l'école Jules Ferry se referme en produisant un claquement sec. Je marche d'un pas décidé le long de l'austère façade datant des premières années du vingtième siècle. Je n'enseignerai plus. Changer de vie, c'est aussi simple que ça.



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