KikouBlog de Le Lutin d'Ecouves - Mars 2012
Le Lutin d'Ecouves

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Archives Mars 2012

SUR LE CHEMIN DE NANTES

Par Le Lutin d'Ecouves - 25-03-2012 20:55:44 - 10 commentaires

25 mars 2012

Une odeur de printemps

 
Plus que trois semaines, le cycle d'entraînement pour le marathon de Nantes entre dans sa dernière phase. Après avoir enserré les organismes dans la rigueur glacée de février, la Nature nous offre un surprenant printemps, une ombre de mai aux branches nues et aux fleurs parcimonieuses.
 
 
Huit kilomètres de tour d'Alençon, pour commencer. Marie et Jacques préparent leur premier marathon, Cathy en est à son quatrième. Ils m'ont demandé de leur servir de coach et c'est donc moi qui leur prépare leurs entraînements. 
 
Les séries de 300m sur piste de jeudi dernier n'ont pas trop  laissé de traces chez mes compagnons et je ne m'étale pas trop sur la raideur de mes cuisses...
 
 
Nous allons longer la Sarthe à plusieurs reprises dans ce tour de ville. Nous passons d'abord par la Fuie des Vignes, zone humide plantée de peupliers. 
 
 
Remontée vers les boulevards puis retour sur les berges de l'arboretum. Nous sommes en pleine ville et mesurons la chance que nous avons de vivre dans une cité à taille humaine.
 
 
L'ancien moulin de Guéramé marque notre fuite vers la campagne, nous quittons bientôt Alençon pour Condé sur Sarthe.
 
 
 
Le bourg de Condé se profile, j'ai mangé mon pain blanc. Plus que quelques centaines de mètres et nous démarrons le programme : 5000m + 4000m + 3000m à 11km/h pour les filles et à 13 km/h pour moi et Jacques.
 
 
Mon travail de coach consiste à annoncer les vitesses à mon compagnon, histoire de l'empêcher de tourner à 14 à l'heure. Jacques est une sorte de Pur-Sang doté de la force d'un Percheron. Il me fait penser à mon cher ami Mustang en encore plus fougueux. Les semaines d’entraînement lui ont bien profité et je peine parfois à le suivre.
 
Vous avez vu ma belle tenue achetée chez Lidl ?
 
Condé, Lonrai, Cuissai puis route de Radon, l'occasion de faire des photos se fait rare à ce rythme en dehors des intervalles qui ne durent que 2 min 30 chacun.
 
 
Fin des accélérations, il reste 25 minutes à courir pour boucler notre programme qui doit durer 2h15 pile. Nous musardons enfin à 10 à l'heure.
 
Une dernière photo et nous arrivons enfin à Radon en même temps que les filles.
 
 
25 km 200 pour nous et 22 km 800 pour les filles, en 2h15 pile. C'est ce que j'avais prévu. J'aime la précision. Il ne reste plus qu'à aller boire la bière à la terrasse de notre QG.
 
Hou ! On y est allé fort !
 
 
Une petite compétition de 15 kilomètres dimanche prochain (Alençon-Médavy) pour se mettre en jambes et toujours les sorties en semaine ; la phase d'entraînement se termine bientôt pour laisser place à la phase de relâchement de deux semaines dont le programme va nous sembler léger.
 
Le 15 avril, Jacques s'envolera au marathon de Paris alors que nous courrons concomitamment à Nantes. 
 
A neuf heures, en Bretagne ou dans la capitale, nous nous élancerons, affrontant la glorieuse incertitude du marathon. Echec ou réussite, qu'importe. Il nous restera toujours le souvenir de ces douze semaines de préparation confraternelle.
 

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MISERERE DEI, MEUS

Par Le Lutin d'Ecouves - 15-03-2012 19:43:38 - 4 commentaires


Chère Maman,
 
 
Je suis, grâce à Dieu, en bonne santé. Pour le moment, nous sommes sommairement logés, je dois partager ma chambre avec Papa et tu le sais bien, Maman, je ne puis trouver aucun repos à côté de lui car il ronfle tant ! On croirait une vieille machinerie d’orgue mal entretenue ! 
 
L’air de Rome me réussit ainsi qu’à mon  cher Papa. Hier, nous sommes allés à l’église Saint-Pierre. Oh, j’aurais aimé que ma chère sœur Nannerl fût avec nous pour admirer tous ces merveilleux édifices à la beauté si régulière comme tant de choses ici.
 
Voyant les fidèles le faire, j’ai demandé à Papa si je pouvais baiser le pied de la statue de Saint Pierre dans l’église mais comme je suis trop petit (j’ai pourtant quatorze ans !), il a fallu qu’il me porte pour que je puisse y parvenir. Quel malheur de ne pas être plus grand !
 
Nous avons assisté à la messe et ensuite, suivant les officiels de notre sainte mère l’Eglise, nous avons assisté à un banquet lors duquel nous vîmes sa Sainteté de très près, chère Maman, car nous nous sommes retrouvés à côté de lui, au bout de la table. 
 
Je suis fou, je le sais ! Il faut que je te raconte comment j’ai procédé : Papa était fort réticent mais j’ai réussi à l’entraîner à ma suite. Il nous a fallu passer  deux portes gardées par des gardes suisses en armes et nous avons dû nous frayer un chemin parmi des centaines de personnes. Nul ne nous connaissait mais nos beaux vêtements et l’aisance naturelle avec laquelle je demandais en Allemand à mon domestique d’appeler les Suisses pour les prier de faire place nous ont aidé à passer les obstacles.
 
Dis à Nannerl que l’on m’a pris pour un jeune prince allemand et Papa pour mon majordome. Le domestique se garda bien de détromper les gardes. Nous arrivâmes à la table des cardinaux dont l’un était le cardinal Pallavicini. Il me fit signe et me dit en italien : 
« Voulez-vous avoir l’obligeance de me dire qui vous êtes ? » Je lui dis dans sa langue qui nous étions et j’en profitai pour lui présenter les lettres de recommandation que nous avions toujours sur nous et qui lui étaient destinées. « Vous êtes le célèbre jeune garçon au sujet duquel on m’a écrit ? Vous parlez fort bien l’italien, mon garçon. Quant à moi, je sais parler quelques mots dans votre langue… » 
Et son Eminence entreprit de me dire avec un bien comique accent : « ik kann auck ein benig deutsch sprecken. » Papa dut me pincer sous la table pour que je ne rie pas au nez de ce prince de l’Eglise ! Son Eminence nous présenta ensuite à Sa Sainteté qui se trouvait à côté. Celle-ci esquissa un léger signe de tête pendant que nous nous inclinions. Il ne se doutait pas du tour que le farceur que je suis allait lui jouer le lendemain.
 
Lorsque nous partîmes, je  baisai la main du cardinal ; il me fit un aimable compliment et nous invita pour le lendemain Mercredi Saint à assister à la messe lors de laquelle nous pûmes avoir la chance d’écouter dans les premiers rangs  l’exécution du célébrissime Miserere de Gregorio Allegri.
 
Tu sais, Maman, que cette œuvre est connue dans toute l’Europe et que l’on raconte qu’aux premières exécutions de l’œuvre lors de la Semaine Sainte, il y a bien cent quarante ans, les femmes enceintes accouchaient subitement et les plus fiers seigneurs se pâmaient comme des demoiselles. La pièce du vieux Gregorio était si jalousée par le Vatican que l’interdiction fut faite de la copier sous peine d’excommunication et aujourd’hui encore, il n’est pas permis d’entrer dans la Chapelle Sixtine avec une plume et du papier les jours d’interprétation du Miserere.
 
Mais tu sais, chère Maman, comme ton fils est fou ! Je n’eus pas besoin de papier et, si cette musique est fort belle, sa structure est très simple et ton fils a recopié de mémoire toute la partition une fois revenus, Papa et moi, à notre logis. Dis à Nannerl, ma sœur aimée, que je lui ramène un trésor de la cité du Pape et que, pour ce faire, j’ai bravé l’excommunication ; ça va l’impressionner.

Je vous embrasse mille fois, Maman et Nannerl. Papa vous embrasse tout autant ; enfin, il faut vous dire la vérité, il ronfle déjà. 
 
Avec toute mon affection, votre cher fils et cher frère,
 
Wolfgang Amadeus

 
Gregorio Allegri (1582-1652)
Miserere
 
 

Rassurez-vous, Wolfgang ne fut pas excommunié et le Pape leva l'interdiction portant sur le Miserere dès l'année suivante...

Cette lettre honteusement apocryphe a été rédigée par le Lutin d'après de véritables courriers de Wolfgang Amadeus et Léopold Mozart (1770).



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QUATRE MORCEAUX DE BOIS

Par Le Lutin d'Ecouves - 09-03-2012 19:28:40 - 9 commentaires

 
Janvier 1974

Je venais juste d'avoir dix-huit ans et ressemblais plus à un guitariste de Hard Rock qu'au gendre idéal.
 
"Tu resteras bien manger la soupe ?", la phrase rituelle était lancée par la mère de ma petite amie. Cette invitation ne se refusait pas et je pris place à table en face de la petite sœur qui observait mes faits et gestes avec curiosité.
 
Jean allait sur ses cinquante ans et occupait la place en bout de table, sa place avec son tabouret et son couteau. 

C'était un homme du bois. Ses mains, dont il était si fier de l'intégrité après toutes ces années de labeur, avaient fabriqué la table à laquelle ses cinq enfants prenaient leurs repas. Les sièges aussi, étaient sortis de son atelier au sous-sol ainsi que les portes, les meubles et autres accessoires en bois. Même les planches à découper étaient son œuvre avec leurs rigoles permettant à la sauce de s'écouler avant de stationner dans une dépression circulaire. La famille eût été chinoise, il aurait confectionné les baguettes destinées au repas...
 
J'étais encore adolescent et donc rebelle ; je ne partageais pas la culture de ce couple qui m'accueillait mais, malgré tout, j'étais impressionné par cet atelier de menuisier où les innombrables outils attendaient dans un impeccable garde-à-vous que leur maître les sollicite.

Jean vit rapidement que je ne comprendrai rien à son métier et ne chercha pas à me l'expliquer plus avant. Il respectait mon ignorance en la matière.

Respecter, beau verbe empreint d'humanité ; ce fut effectivement un respect mutuel qui s'installa dès lors entre nous avant de prendre progressivement les couleurs de l'affection. Je n'avais plus de père depuis quatre ans et un père ne se remplace pas mais cet homme, grand dans sa simplicité, fut ce qui s'en rapprocha le plus durant les années qui suivirent.

A cette époque, on quittait vite le nid et, une trentaine de mois plus tard, j'emménageai avec ma Josette dans un petit appartement presque dépourvu de meubles. Une cuisine en formica, un tapis, des chauffeuses en mousse et une boîte en carton faisant office de table de salon ; nous étions heureux car chez nous.
 
L'affaire s'était faite avec l'aide matérielle des deux frères et le feu vert de la maman, mais ma jolie compagne n'avait pas osé l'annoncer de manière directe à son père, préférant déléguer l'ambassade à sa mère.

N'ayant pas les moyens de nous acheter un lit, nous avions opté pour un simple cadre en bois sans pieds et un matelas achetés aux Nouvelles Galeries. Cela suffisait à notre bonheur car les jeunes amours ne se soucient guère des cailloux du chemin.

Nous étions chez nous depuis quelques jours quand nous eûmes une visite impromptue. La porte s'ouvrit sur un Jean hilare, fort ravi de visiter sa deuxième fille en son appartement. Il tenait un sac et quelques outils à la main. Avec son fort accent normand, il annonça qu'il avait appris que nous couchions quasiment par terre, que ce n'était pas sain et qu'il savait ce qu'il fallait faire ; d'ailleurs, il avait fait des pieds pour notre lit à partir de morceaux de bois de récupération.
 
Il sortit quatre morceaux de bois de chêne habilement ouvragés, se dirigea vers notre chambre et entreprit de visser son travail à notre lit.

Josette était aux anges ; elle, qui craignait le jugement de son papa, avait compris que ces quelques pièces de bois étaient un assentiment. Jean, homme de la terre et du bois respectait avec pragmatisme notre choix de vie commune. Et tant pis si l'on ne passait pas tout de suite devant le maire comme la génération précédente. Du moment que sa fille semblait heureuse...
 
Un lit pour débuter dans la vie, un lit pour la terminer dans la dignité ; c'est dans un lit de chêne que Jean repose à présent.

Je ne lui ai jamais dit que je l'aimais. Il le savait, cela suffisait.

8 mars 2012


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PRINTEMPS DES POETES

Par Le Lutin d'Ecouves - 03-03-2012 15:12:40 - 5 commentaires

 

Faire écrire de la poésie par des élèves de dix ans (CM1-CM2) sans tomber dans la mièvrerie des vertes prairies de l'Enfance n'est pas chose facile. Ils ont un don inné pour appréhender l'attente de l'adulte et peuvent vous tartiner des litres de sirop d'érable s'ils sentent qu'en face, ils ont affaire à du neuneu en barre.

C'est pourquoi, j'ai commencé la séance de Français par une longue discussion sur ce qu'est l'enfance (thème de cette année) sans en occulter les problèmes, et sur le statut actuel de mes élèves qui sont maintenant aux portes de l'adolescence. J'ai ensuite donné mes consignes : réinvestir les compétences en vocabulaire acquises depuis le début de l'année pour écrire un texte court et expressif aux vers rimés mais non mesurés.

Pour qui sait lire entre les lignes, ces poésies donnent une bonne géographie de l'enfance avec ses plaines et ses montagnes qu'il faudra bien gravir. Voici quelques morceaux choisis :

 

Mon âme


Mon malheur, mes pleurs

Parfois ça me fait peur.

Mes obligations, mes sanctions

Ça me fait des fois des sensations


Mon supplément, mes parents

Que de sentiments

Mon frère, avec son allure fière

Que de mystère.

 

A...

 

*

 

Joie, chagrin,

Tristesse, câlin

Emploi du temps enfantin.

Tout ça ne rime à rien


Je regrette pourtant

De ne plus être enfant

Des histoires anciennes

Qui me reviennent...


N...


*


La peur c'est un malheur

qui vient entièrement du cœur


On ne peut jamais l'arrêter

les cauchemars sont souvent ressuscités


Il m'ont démantelée

J'ai essayé de les expulser


Mais ils reviennent, m'envahissent

c'est vraiment trop intensif


Il est temps que ces cauchemars finissent


C...

 

*

 

L'école


A la maternelle, nous étions petits

Mais maintenant plus aujourd'hui.

Hélas, nous sommes toujours enfants.

Français, maths, géographie

Lecture, histoire ou géométrie

Tout cela nous apprenons

Sans nous poser de questions.

Quand nous serons adolescents,

Quand nous serons plus grands

Nous nous demanderons pourquoi

Nous faisons tout cela.


C...

 

*

 
Les peurs imaginaires
 
Quand on s'éveille en pleine nuit
On croit qu'il y a un bandit
Le matin, les parents te font sauter du lit
A midi on mange toujours des brocolis
 
Dans le jardin
Il y a des requins
Le soir, l'alimentation est effroyable
Quand on va se coucher, c'est épouvantable
 
A...


*


Passant du rire aux pleurs


Passant du rire aux pleurs,

Les fous rires et les plus grandes peurs,

Les secrets de meilleures amies,

Ainsi que les pires ennemies,

Les bêtises et les frères et sœurs,

Disputes, colères,

Tout cela, c'est mon univers !


L...

 


Les frères c'est l'enfer

Les pères ça soulève des haltères

Les mères c'est amer

Les sœurs c'est l'horreur

Et moi dans tout ça je suis tout baba !


M...

 

*

 

L'école


A l'école j'étais brillant

Dans la cour j'étais bruyant

Chez moi j'étais transparent

Mais maintenant je suis content


S...


*

 

Quand je partirai de chez mes parents

Je serai beaucoup plus puissant

Je ne serai plus adolescent


J'irai faire ma vie loin d'ici

Dans un petit coin au paradis


J'aurai une petite amie

Ma vie ne se termine pas ici.


T...

 

 *

 

Avoir des grands frères,

C'est l'enfer

Ils vous font taire,

Avec leurs grands airs


Ils racontent plein de canulars

Et se prennent pour des tsars


Ce sont de grands usurpateurs

Ils racontent n'importe quoi pour s'enfuir,

Quelques heures,

Loin de leurs petits frères et sœurs


Leur spécialité,

Ce sont les moqueries

Ils nous regardent grandir

Et aussi rire


Puis, un jour, nous servirons d'exemple

Pour les plus petits.


S...

 

 

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