Mercredi matin : entraînement de 3x20min en vitesse semi-marathon sur piste, le 100km de Millau, ça ne s'improvise pas ! Pendant que Sébastien galope et que Katia, affûtée comme une lame de tungstène me décolle avec une incroyable facilité, moi, je me traîne...
Au bout d'une trentaine de minutes, arrive une classe de collège, certainement des troisièmes. Il fait grand soleil et nous courons en débardeur alors que les jeunes arrivent habillés dans des survêtements qui nous feraient exploser de chaleur même au plus fort de l'hiver.
Je remarque un bon quart des filles qui s'assoient le long de la clôture pour n'en plus bouger. C'est certainement les victimes des menstruations qui, c'est bien connu, oblitèrent toute idée de sport. Ayant entraîné plusieurs femmes au marathon, je suppose que mes pauvres amies qui ne rataient aucun des quatre entraînements hebdomadaires étaient en aménorrhée permanente...
Le prof, bien jeune, commence par demander aux collégiens de s'échauffer en faisant un tour de piste. Au bout de cent mètres, un autre groupe de filles se met à marcher en ronchonnant (D'abord, j'aime pas courir !) pendant que le reste du groupe rampe à l'exception de quatre ou cinq garçons qui ont encore gardé le goût du jeu ; j'apprendrai plus tard que ce sont les footeux de la classe.
Après quatre cents mètres "d'échauffement", le prof montre aux élèves quelques mouvements de gym, le genre d'assouplissements à ressorts que l'on ne pratique plus depuis vingt ans et d'autres exercices, cette fois-ci plus adaptés à l'athlétisme.
Pas facile son boulot : enseigner le sport est, à mon sens, plus dur que d'enseigner les maths car on est sur de l'humain, du corporel, et, chez les ados, il n'y a rien de plus mouvant et problématique.
Séries de deux cents mètres : les footeux partent comme des bombes suivis par quelques rappeurs qui explosent en milieu de course. Tant bien que mal, le jeune enseignant indique les performances à ses élèves assorties de quelques encouragements.
Reste quelques mangeurs excessifs de mac do qui s'évertuent avec lenteur mais qui terminent tant bien que mal leur demi-tour de piste. Une élève est cependant rétive (Je sais pas courir !), le prof s'énerve un peu : "Mais tu sais marcher, alors fais au moins tes deux cents mètres !" La gamine l'envoie promener.
"Mais... si tu cours pas, comment veux-tu que je te note ?" explose enfin le prof.
Ben voilà mon gars, me dis-je en continuant de faire mon hamster sur la piste, tu as touché du doigt le problème du sport à l'école. Le sport, c'est le corps, c'est le sensible. Quand on note un devoir d'histoire ou un exercice de maths, on apprécie un travail, pas celui qui l'a fait. Quand on note une performance sportive chez un ado, on s'attaque à un corps qui est un continent en pleine révolution tectonique.
Notre entraînement sur piste se termine, Katia a déjà parcouru quinze kilomètres, elle ruisselle. Quelle ado était-elle, je n'en sais rien. Quant à moi, je me souviens vaguement de mes cours de sport au collège et au lycée mais j'ai cependant gardé des archives :